Syndicat & entreprises : l’art du dialogue social

13 novembre 2025 par
Era Balaj

En Belgique, la concertation sociale oblige la rencontre, alors mieux vaut la maîtriser. Xavier Culot, consultant RH et représentant patronal, partage quelques conseils pour renouer un dialogue constructif entre entreprises et syndicats.

La négociation sociale a longtemps eu des allures d’arène. Patronat et syndicats, deux camps, deux visions, parfois deux langues. Pourtant, le modèle belge repose sur un seul principe : la concertation. « On ne peut pas ne pas se parler », rappelle Xavier Culot, consultant en ressources humaines et représentant patronal en commission paritaire. Derrière les tensions apparentes, le dialogue reste le meilleur levier de paix sociale.

Les syndicats, des acteurs ins​crits dans le jeu social

Pour comprendre le dialogue social, il faut déjà comprendre les syndicats. Il s’agit d’abord d’associations de défense des travailleurs et travailleuses, nées au XIXᵉ siècle des anciennes caisses d’entraide. En Belgique, leur présence dans l’entreprise fait partie du paysage légal et institutionnel : conseils d’entreprise, comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT), délégations syndicales… « Ce sont les portes d’entrée légales du syndicat dans l’entreprise. La loi a tout balisé : fréquence des réunions, sujets à aborder, informations à transmettre », explique le conseiller.

Le cœur du dialogue social, c’est la reconnaissance mutuelle. Le rôle de l’employeur·euse n’est pas de contourner les syndicats, mais d’assurer le bon fonctionnement des organes de concertation : réunions régulières, informations partagées, ordres du jour clairs. « Quand les bases sont respectées, les discussions deviennent constructives », observe-t-il. À l’inverse, un manque de transparence ou une promesse non tenue suffit à gripper la machine. « Il s’agit d’une vitesse de croisière à trouver ; mais comme le bateau peut affronter une tempête, le dialogue peut se durcir au gré des changements qu’une entreprise peut rencontrer mais à nouveau, il faut conserver le dialogue », poursuit Xavier Culot.

Les codes du dialogue social

Bien négocier, c’est d’abord connaître le terrain. Chaque organe a ses codes, son rythme, ses compétences. Dans ce cadre très balisé, la forme compte autant que le fond : des procès-verbaux soignés, des réunions préparées… autant de signaux qui montrent que la direction prend la concertation au sérieux. Même dans les moments de tension, serrer la main avant de quitter la table, c’est déjà un pas vers la paix sociale.

Cette rigueur n’empêche pas la souplesse. Savoir reformuler une question, reporter un point, admettre qu’on ne peut pas répondre tout de suite : c’est aussi une marque de respect. Pour Xavier Culot, le pire ennemi du dialogue, c’est la langue de bois. « Ce que dit le patron est gravé dans le marbre ». Mieux vaut une parole prudente qu’une promesse mal tenue. La cohérence, au fond, est la meilleure preuve de sérieux.

Du compromis à l’accord gagnant-gagnant

La Belgique a une longue tradition du compromis : on y négocie tout, depuis des décennies. C’est ce fameux « mariage de la carpe et du lapin » qu’évoquent souvent les spécialistes du dialogue social, c’est-à-dire l’art d’unir deux concepts incompatibles. Pour le consultant RH, un compromis n’est pas toujours une victoire : c’est simplement « le plus petit commun des dénominateurs ». L’idéal, dit-il, serait d’aller plus loin : chercher un accord gagnant-gagnant.

Exemple : modifier un horaire de travail, revoir une organisation, ouvrir le dimanche… Derrière chaque mesure se cache une réalité humaine : un train plus tôt, une garde d’enfant à réorganiser, une vie privée bousculée. « Si on ne comprend pas pourquoi une partie s’oppose, on ne pourra jamais trouver d’accord », observe Xavier Culot. La négociation sociale n’est donc pas un exercice de persuasion, mais de compréhension.

Négocier, écouter, apprendre

Dans le système belge, aucun juge ne tranche les conflits collectifs. Les partenaires doivent s’entendre, d’une manière ou d’une autre. « On est condamnés à se parler », résume-t-il. L’écoute devient alors le moteur de la négociation : c’est souvent là que se joue la réussite d’un dialogue.

Lors de l’atelier « Nég​ociations syndicales » qu’il anime avec Alain Lancelot, Xavier Culot reprend une métaphore : les négociateurs peuvent être des requins (qui mordent), des carpes (qui subissent) ou des dauphins (qui s’adaptent). « Les meilleurs sont des dauphins », expliquent-ils. Ni faiblesse ni domination, mais une posture d’équilibre. C’est cette attitude, à la fois ferme et souple, qui transforme une négociation en dialogue constructif.

Un art à cultiver

La négociation sociale, c’est aussi une école de patience. Elle demande de la méthode, du respect et une bonne dose de réalisme. En retour, elle offre un outil de stabilité et de cohésion pour l’entreprise. « La paix sociale se construit dans les moments où l’on choisit encore de se parler », conclut le conseiller en ressources humaines.

Cette approche, Xavier Culot la partage aux côtés d’Alain Lancelot lors de l’atelier « Négociations syndicales » organisé par Beci (mentionné plus haut). Une formation de deux jours, destinée aux entreprises, afin d’apprendre à mieux dialoguer, comprendre les règles du jeu et, surtout, construire des relations sociales plus apaisées. Dans l’entreprise comme ailleurs, on gagne toujours à mieux se parler.


Consultez notre agenda pour connaître les prochaines sessions des ateliers « Négociations syndicales ».

Pour toute question ou information complémentaire, contactez Frédéric Simon, responsable de la communauté Talents : fs@beci.be

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