Prévention contre le suicide dans l’entreprise : des solutions existent

20 novembre 2025 par
Vincent Liévin

La santé mentale est au cœur des priorités de chaque entreprise. En matière de prévention, la question du suicide est complexe. Afin de la percevoir clairement, il convient de rappeler que, chaque jour, cinq personnes se suicident en Belgique. L’administrateur délégué du centre de santé mentale Un pass dans l’impasse, Thomas Thirion, revient sur cette réalité sociale et entrepreneuriale : « Cela représente même la première cause de mortalité chez les 10-54 ans, dépassant de loin les décès dus aux accidents de la route ou au cancer. » 

Au regard de l’âge évoqué dans les données de santé publique, l’impact est réel sur le monde de l’entreprise. « Cet aspect est d’autant plus prégnant que, pour chaque suicide, entre 15 et 20 tentatives de suicide sont constatées. Un raz-de-marée silencieux qui permet de mieux percevoir le mal-être psychique dans notre société. » 

Le suicide touche toutes les couches de la population : « Le taux de suicide masculin est près de trois fois supérieur à celui des femmes. Cependant, on dénombre plus de tentatives de suicide chez les femmes, et en particulier les adolescentes. » 

Dans le cadre de la prévention contre le suicide dans le monde de l’entreprise, Beci peut rediriger la personne en difficulté psychologique vers Un pass dans l’impasse, qui offre également, depuis juillet 2020, un soutien psychologique spécifiquement destiné aux indépendant·es et entrepreneur·es francophones. Ce service leur permet de bénéficier d’une ligne d’assistance téléphonique gratuite (0800/300.25) et de séances de soutien, accessibles financièrement et géographiquement. Selon l’INAMI, entre 2016 et 2021, les cas de dépression de plus d’un an chez les indépendant·es ont bondi de 67 %, tandis que les burn-out ont augmenté de 47 %. « Un·e indépendant·e se suicide tous les trois jours en Belgique », déplore Thomas Thirion. 

Un soutien en quatre séances 

Un·e entrepreneur·e, en détresse et en souffrance intense, peut parfois avoir des idées suicidaires. « Nous avons deux pôles et deux trajets de soins différents. D'une part, nous écoutons et soutenons l'entrepreneur·e en difficulté (burn-out, deuil, difficulté temporaire, etc..) . Un soutien en quatre séances permet une réaction rapide et encadrée. D’autre part, si l’entrepreneur·e évoque des idées noires, un accompagnement spécifique et plus long est mis en place au sein de nos services. » 

Il attire l’attention sur un élément particulier : « Très peu d’entrepreneur·es vont avouer se trouver au fond du gouffre et nourrir des idées suicidaires. Pour arriver à une telle confidence, la parole doit se libérer avec une relation de confiance dans un trajet de soins qui peut durer le temps de gérer la crise et de soutenir la personne. » 

Dégager des solutions 

La réalité de terrain rattrape bien souvent l’entrepreneur·e : « 50 % des entrepreneur·es, qui viennent, éprouvent des difficultés financières. Nous avons 12 antennes de consultations réparties sur la Wallonie et Bruxelles, où nous offrons une accessibilité financière à toutes et tous. Nous proposons également des consultations sociales gratuites. L’objectif est de dégager des solutions. » Les réseaux de sentinelles de l’association (vous pouvez devenir aussi une sentinelle) apportent aussi une réelle plus-value : « Nous disposons d’un réseau de sentinelles spécialisées en prévention du suicide et d’un réseau de sentinelles en contact direct. 

Ce dispositif permet d’offrir une aide proactive : nous avons presque une alerte par jour. Nous disons aussi aux proches de ne pas hésiter à nous appeler. 86 % des alertes aboutissent à une consultation. » 

Un autodiagnostic de prévention 

De leur côté, Mathieu Seron, coach et consultant indépendant pour les entrepreneur·es, et Michel Kaisin, conseiller en prévention sécurité santé, proposent un autre projet : « Les ateliers de 7 Jours Santé permettent, à l’aide d’un test d’autodiagnostic, d’évaluer la santé, mais aussi l’état mental, pour assurer la continuité de l’activité. 

Avec différents outils, nous évaluons l’organisation de travail et la gestion du temps qui est un défi de chaque instant. Le diagnostic socioéconomique est une démarche volontaire qui permet d’anticiper le changement qui peut mener à une “surcharge mentale” s’il n’est pas considéré préventivement. » 

Ils le disent sans détour : « La prévention en matière de santé est le point noir des dirigeant·es d’entreprise. » 

Selon le rapport de recherche sur les petits commerces bruxellois, réalisé par Céline Mahieu et Isabelle Godin : 20 % dorment moins de 6 heures par nuit et 20 % présentent des signes précurseurs de burn-out. Leur réflexion est globale, tant au niveau de l’alimentation que du bien-être, etc. Ils organisent des Webinaires sur différentes thématiques (visualiser les risques pour préserver sa santé et éviter le surmenage, prendre son temps pour en gagner, apprendre à gérer son stress en se libérant de ses émotions…). Les ateliers permettent d’anticiper : l'intelligence émotionnelle, le thermomètre du stress, un petit outil visuel tout simple pour pouvoir s'autoassister... 

« Notre diagnostic en ligne (diagnostic.7jsante.be) est un outil d'auto-coaching augmenté avec l'intelligence artificielle. Celle-ci agit en complément pour repérer les zones d'ombre et fournir des premiers outils (gestion du temps, stress, etc.). 

À cela s'ajoute le coaching humain pour permettre à l’entrepreneur·e d’aller plus loin. Nous insistons sur le fait que notre outil est conçu pour mener l'entrepreneur·e vers un suivi professionnel adapté, qu'il s'agisse de psychologues, coach·es, médecins, juristes ou conseiller·ères financier·ères. »

Cet outil est aussi important dans le cadre de la prévention du suicide : « Une personne, n’a pas à priori une idée suicidaire du jour au lendemain. Il s’agit souvent d’un enchaînement. Notre questionnaire peut désamorcer des situations qui sont en train de se complexifier. Il est aussi très important de prévenir l'entourage qu'il existe des outils et des aides pour leurs entrepreneur·es. 

L'entourage ne doit pas hésiter non plus à partager ces outils-là avec leurs proches entrepreneur·es qui ne sont pas toujours à l’écoute. » 

La gestion de groupe existe aussi : « Les entreprises qui le souhaiteraient peuvent prendre contact avec nous pour une vue plus globale avec leur comité de direction ou avec leurs responsables proches pour avoir une prise en charge plus globale. »  


Pour toutes questions lorsque votre entreprise rencontre des difficultées, contactez le CeD Relance, ici.

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